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La reprise de l'évènement

La reprise de l'évènement est indispensable pour la suite des soins. Plusieurs axes peuvent être abordés:

- Débriefing avec le patient : ressenti, vécu du patient face à la situation, à l'isolement. Recherche de clé relatinnelle. Directives partagées.

- Débriefing avec l'équipe soignante : avec tous les soignants ayant participé à la situation (renforts) ou uniquement avec l'équipe référente. Recherche des points qui ont été efficaces, ceux qui ne l'ont pas été.

- Débriefing contextuel : Analyse du contexte de la situation, principalement au niveau organisationnel, institutionnel afin d'élaborer des pistes de réflexions.

Vous pouvez trouver ci-dessous différents outils de reprise de l'évènement.

Exemples de mesures alternatives

Toute intervention ayant pour objectif l'apaisement du patient est considérée comme une mesure alternative. Ainsi, la créativité, l'imagination et l'interrogation des ressources des soignants, de l'unité sont indispensables.

Ces mesures alternatives peuvent être centrées autour:

- D'activités : promenade, activités sportives (sac de frappe, course, ping pong...), jeux de sociétés, activités autour de la vie quotidienne (rangement, nettoyage...), proposer un café...

- D'entretien : entretien informel, formel, infirmier, médico-infirmier

- Du rôle prescrit : administration d'un traitement au besoin

Techniques de désamorçage

Ensemble de techniques permettant l'apaisement d'une situation:

-Dérivation : proposer autre chose, faire rupture, faire diversion

-Désescalade : Rechercher un apaisement de la situation par palier

-Décalage : provoquer la surprise chez le patient

-Marche à petits pas : accompagner le patient dans ses déambulations

-Marche à petits pas : accompagner le patient dans ses déambulations

-Espace d'apaisement

-Accolade thérapeutique : rapprochement d'un ou plusieurs soignant auprès du patient dans la recherche d'une contenance suffisante

-Dialogue de crise

-Immobilisation thérapeutique : immobilisation manuelle du patient afin d'obtenir un apaisement du patient (recherche d'un relâchement musculaire et psychique)

Le dialogue de crise

Le dialogue de crise est une méthode d'entretien spécifique avec les patients souffrants de psychose aiguë, développée par le Dr. Graz et son équipe en 2009 en Suisse. Inspiré par les travaux d'orientation phénoménologique de Henri Grivois, le but du dialogue de crise est d'établir un lien accueillant et constructif avec le patient en crise dès les premiers jours d'admission.Le dialogue de crise se fait en 3 minutes lors d'une consultation.

Aspects théoriques

Les concepts de base appartient à la théorie phénoménologique et proviennent de l'observation que certains aspects de l'expérience psychotique, en particulier au début de l'épisode, sont communs à la plupart des gens vivant une psychose. On distingue ainsi trois invariants principaux étroitement liés:

1) Le trouble du mimétisme humain Le mimétisme joue un rôle fondamental dans les rapports humains. Le pilotage de ce système est le plus souvent inconscient et ce réglage permanent entre les humains participe à la qualité de la communication propre à notre espèce. Lors de l'épisode psychotique, cette coordination harmonieuse interpersonnelle est en échec, et le champ de conscience est envahi par « l'expérience mimétique».

2) L'indifférenciation subjective Le patient perçoit avec une acuité telle le phénomène mimétique qu'il ressent une influence inéluctable et universelle des autres sur lui, ou inversement. Le patient est habité par une étonnante impression de ne plus être l'auteur autonome de ses actes et de ses pensées. Les idées délirantes d'influence trouvent sans doute ici leur origine. Cette perte du « quant à soi » du sujet est l'indifférenciation subjective.

3) Le concernement généralisé L'envahissement de la conscience par l'expérience du mimétisme universel a pour conséquence un autre aspect de l'expérience psychotique: partout le patient est l'objet de l'attention de ses semblables. Le patient perçoit qu'il est au centre des préoccupations de tous, en communication avec tout le monde ou presque. De multiples signes lui confirment son rôle particulier, son destin unique. Il devient perplexe face à cette expérience inédite « d'être devenu une sorte d'homme d'exception». Il se sent concerné par chacun et chacun est concerné par lui : c'est le concernement généralisé ou la centralité psychotique, qui peut prendre la forme d'un délire.

Le but est d'éviter la construction délirante en diminuant l'étrangeté de l'expérience vécue à l'aide d'une description de l'état subjectif du patient, qui fait sens pour lui.

Utilisation du dialogue de crise

Cette nouvelle approche nécessite quelques minutes du temps de consultation. Elle doit être utilisée au tout début de l'entretien, après les salutations d'usage, afin de faciliter l'établissement d'une bonne relation soignant-soigné. Une deuxième discussion aura lieu 3 à 4 heures plus tard (le premier jour), plus tôt si nécessaire. Ce dialogue, véritable « soins intensifs », est proposé 2 à 3 fois par jour durant 3 à 7 jours selon l'évolution, suivi d'une deuxième semaine (éventuellement moins intensive), voire d'une troisième. Dans les tous premiers jours, le dialogue commence chaque fois par le premier repère, jusqu'à ce qu'un début d'amélioration de la symptomatologie annonce la « sortie de crise ».

Cette méthode s'est aussi révélée pertinente pour entrer en matière quand le patient présente un fort déni de son expérience psychotique.

Le dialogue de crise

Première étape de cette démarche, mettre à disposition du patient des mots lui permettant de décrire son expérience:
1)« Êtes-vous au centre du monde,.en communication avec tout le monde? » Cette question vise à provoquer une surprise par un léger décalage du cadre normal de discussion en milieu Clinique.

Deuxième repère : valider explicitement l'expérience du patient :
2)« À votre place, je vivrais la même chose - C'est une vraie expérience importante ». Nous admettons ainsi que tout ce que le patient peut dire, penser ou ressentir est « réel »,dans le sens qu'il s'agit d'une véritable expérience, sans discuter de « ce qu'est la réalité ».

Troisième repère : proposition de « mise en mots » du moment du début de l'expérience psychotique :
3) « Nous sommes tous en lien les uns avec les autres. Parfois, on ne sait plus qui imite qui, qui influence qui ». Cette explication peut donner au patient l'occasion de se rappeler plus précisément le début de l'épisode et peut l'aider peu à peu à réaliser que tout « délire » serait une tentative de donner un sens à son expérience extraordinaire.

Quatrième repère : encourager à différencier qu'il existe un avant le début de l'épisode et un après.
4) « Je ne pense pas qu'il va se passer quelque chose d'important. Souvenez- vous, cela n'a pas toujours été ainsi. Essayez de retrouver comment vous perceviez les autres avant ». Ceci peut éviter au patient de construire des interprétations hâtives et l'encourager à porter un regard critique.

Résultats

Plusieurs études ont été réalisées afin de démontrer l'efficacité de cette méthode.

Le dialogue de crise est considéré par ses utilisateurs comme une aide pratique pour établir un lien avec le patient, stabiliser son humeur, construire une alliance thérapeutique, tout en permettant au patient de donner sens à son expérience et d'affiner ses capacités à détecter les prémisses d'une éventuelle récidive.

Le dialogue de crise tend à diminuer l'étrangeté de l'expérience vécue à l'aide d'une description de l'état subjectif du patient, qui fait sens pour lui et l'aide à diminuer l'angoisse et l'agitation, et si possible de déconstruire le délire.

Ch.Widakowich, J.Snacken, B. Graz - Méthode phénoménologique pour la prise en charge des psychoses aiguës : Le Dialogue de Crise

Fonction de thermométrie

Evaluation du niveau de quiétude du service, de l'ambiance, des tensions. C'est «aller prendre la température du service»

- En lien avec le groupe de patient : Se traduit par des informations non écrites, sonores, visuelles, tactiles, olfactives (ex : claquement de porte, cris, démarches rapides, mouvements, déambulations, regroupement etc...) La sensibilité du soignant permettra de repérer précocément ces signaux, et ce décodage habituel/inhabituel.

- En lien avec le groupe soignant : identité des collègues présents à la prise de poste, présence ou non des intervenants de l'équipe pluriprofessionnelle, état émotionnelle du groupe de travail en lien avec les vécus professionnels et personnels. Cela traduit dans certains cas l'ambiance du service, mais pas nécessairement.

- Patients thermomètres : patients sensibles à l'ambiance du service, qui s'imprègnent des tensions. Nécessite une connaissance des patients.

Lanquetin Jean-Paul et Tchukriel Sophie. L'impact de l'informel dans le travail infirmier en psychiatrie. Rapport de recherche 29 Février 2012

Psychodynamique de la violence

Laurent Morasz développe la psychodynamique de la violence au travers de 6 phases :

- Phase d'activation: lors de la survenue d'un fait ou d'un sentiment nouveau (peur, anxiété), un stress important apparait

- Phase d'intensification: si la personne n'est pas capable de gérer ce stress, il va s'accroître et cela va provoquer une augmentation de la frustration, de l'excitation et la situation va s'intensifier

- Phase de crise, passage à l'acte, agir avec ses possibilités de réplique: c'est l'apogée de la situation dans laquelle il y a un débordement des tensions internes. La personne ne gère plus rien, et la crise explose, elle va se comporter de manière désinhibée

- Phase de récupération: après la phase intense de la crise, il est d'usage que la personne reprenne le contrôle de soi et de ses pulsions agressives. Cette phase est critique, car à tout moment, si de nouveaux stimuli apparaissent, la crise peut se décencher à nouveau. C'est le principe d'un processus dynamique

- Phase de stabilisation technique: l'irritabilité de la personne est suffisamment contenue pour qu'un intervenant puisse travailler l'acte violent avec la personne

- Phase de reprise et d'élaboration: permet de mettre en mots et comprendre ce qui s'est produit en faisant le lien entre l'acte violent et les processus psychiques afin de trouver un sens à ce qui s'est passé.

Nous pouvons décrire ces phases au travers de cette courbe:

Légende : Variables institutionnelles et soignantes : En fonction du degré d'application des préventions primaires, secondaires et tertiaires, cet axe peut monter ou descendre. Dans certains hôpitaux, certains services, une même situation ne sera pas perçue de la même manière et donc pour une même crise, les actions, les réponses ne seront pas forcément identiques

L'importance de connaître cette dynamique relève du fait que nous sommes ainsi en mesure d'intervenir non pas seulement au moment de la crise, mais plus précisément à trois niveaux : avant (prévenir), pendant (contenir) et après (élaborer) l'incident violent. Laurent Morasz (2002) préconise de travailler dès que possible à n'importe laquelle de ces étapes, voire même à plusieurs étapes afin d'obtenir des résultats concluants.

Laurent Morasz, " Comprendre la violence en Psychiatrie : approche clinique et thérapeutique"", édition DUNOD, 2002